
par Guy BOLEY
Editeur: Grasset
ISBN: 9782072724107
Ma cote: 8 / 10
En 10 lignes, max! (Présentation du livre par frconstant)
Guy BOLEY frappe juste et fort. Il fait revivre la noblesse du métier de forgeron, la puissance du feu et le chant des enclumes. Avec une écriture simple, souple et profonde, Guy BOLEY nous ouvre à la création de pièces uniques, complexes et génératrices de fierté légitime de l’artisan. Il nous dit aussi la noblesse du travail des femmes qui faisaient tourner la maison. Et, plus tristement mais très justement, il nous dit la fragilité et la bascule de la vie; l’horreur vécue face à la mort inacceptable d’un enfant parti trop tôt. Et le grand frère la-dedans? Le livre explore la quête d’une place à trouver dans la vie… Accepter d’être ce qu’on est, sans nier ou tuer ni le passé, ni le présent des autres. « Fils du feu » est un hymne à la vie, un mille-feuille de souvenirs, de tendresse, questions existentielles, d’humour et d’auto-dérision. Un premier roman abouti, mature. A découvrir!
Ma critique:
« Fils de feu » est le premier roman de Guy BOLEY. Cet auteur écrit comme il a boxé. Les coups, Qu’ils soient de cœur ou de rage, d’espoir ou de regret, les coups sont directs, l’auteur s’expose, esquive, explose mais toujours en vérité . Il écrit comme il a dansé et pris les risques des funambules de haut vol. La musique des mots rend admirablement la musique du souffle de la forge, le rythme des enclumes, la nostalgie à fleur de peau d’un métier d’artisan, la puissance et la fragilité des corps qui déterminent les genres et les modes de vie. Par ses mots à la portée de tous, chargés d’émotion et d’auto-dérision, Guy BOLEY met en scène, donne à voir, à écouter, à deviner et à redécouvrir le métier de forgeron qu’exerçaient son père et Jacky, l’apprenti. Lui, gamin, il observait et remplissait son âme de ce souffle de vie qui émane de la forge, des corps musclés luisant d’efforts et du chant des enclumes qui rythmait la cadence, la vie, le bruit et même le silence annonciateur d’une pièce finie, maîtrisée, unique, encore auréolée des étincelles que faisaient naître son père et Jacky, tous deux , à ses yeux, Maîtres du feu et Seigneur des masses.
Et puis, l’auteur nous raconte sa mère et le travail des femmes, le combat quotidien pour vaincre la crasse, tordre le linge, l’étendre à sécher et donner au gamin de quoi rêver lorsqu’il observait les culottes de Marguerite-des-oiseaux, pièces de tissu aussi grandes qu’un drap de lit pour enfant ! Avec une écriture chargée de tendresse, il nous dit la valeur simple du travail bien fait, la joie de vivre en famille, son horreur aussi quand la mort d’un enfant s’immisce comme un grain de folie au cœur d’une mère qui n’acceptera jamais la mort accidentelle de son petit.
L’enfant de la forge, subjugué par l’attrait du corps luisant de l’apprentis, dépassé par la puissance de frappe de son vulcain de père et la fragilité à fleur de cœur des larmes de sa mère ne saura jamais comment grandir, être lui, trouver sa place sans prendre, perdre ou tuer celle des autres. Il deviendra peintre pour devenir lui et se demandera de manière récurrente s’il faut, pour grandir, renier son passé resté présent ou le sublimer? S’il faut s’atteler à faire le vide autour de soi ou, au contraire, faire le plein de ces vides qui scandent la vie et, peut-être lui donne sens.
Ayant trusté pas moins de six prix littéraires, « Fils du feu » est un très agréable premier roman, né à maturité et offert en partage par une plume qui s’enracine dans l’expérience d’une vie féconde, même si, à son époque, pour certains aspects, elle semblait aller à contresens du socialement correct. Guy BOLEY, un auteur dont il faut lire aussi « Quand Dieu boxait en amateur ».
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