de Olga Schmitt

Editions: Le Pas d’Oiseau (2020)

ISBN: 978 2917 971 901

160 pages

Ma cote: 10/10

Ma chronique:

Suprême soviète. Signé Olga Schmitt, ce livre paru aux éditions Le Pas d’Oiseau est un régal. Merci à l’éditeur et à NetGalley, France qui m’ont permis de le découvrir en Service Presse. Un vrai bon moment de lecture !

Le Soviet suprême de l’Union soviétique constituait la plus haute institution législative en Union soviétique. Elle était élue au suffrage universel direct, mais, bémol, uniquement pour des candidats proposés par le Parti Communiste. La liberté de penser, en URSS avait tout de même des limites !

Les soviétiques qui ne correspondaient pas au moule du Soviet suprême pouvaient être déclarés ‘étrangers’ par les autorités et obtenir un visa, aller-simple, pour passer la butte, entendez être bannis de l’URSS et venir se réfugier à l’Ouest.  

Olga Schmitt, née à Moscou, issue d’une famille d’artistes nous conte ici son enfance en URSS, son bonheur d’être scolarisée, les conditions de logement et d’approvisionnement en nourriture de sa famille et son départ vers l’Europe alors qu’elle n’était encore qu’une enfant.

Pour mille raisons qui apparaîtront au fil de son récit, Olga a été essentiellement élevée par sa grand-mère, une Babouchka bardée de médailles gagnées alors qu’elle était pilote d’avion et bombardait Berlin lors de la seconde guerre.

Ce livre est une perle. L’autrice y développe un talent fabuleux de conteuse. J’imagine très facilement un seul-en-scène de cette Olga devenue adulte et nous déversant la vie de Lidia, son héroïque grand-mère, l’amoureuse de celle-ci, Alla (n’oublions pas que l’homosexualité est une maladie mentale, là-bas !) et la vie décentrée de sa mère, artiste perdue dans son rôle de mère, de son père qui a choisi l’ailleurs plutôt que la fidélité et du beau-père, Oleg Tselkov, peintre anticonformiste dont l’autrice a été l’agent artistique et qui reste coté et vendu dans les galeries de nos jours.

Tout est dans le récit de Olga Schmitt, des faits, des rires et des larmes. Et dans une envolée épique, l’apprentissage à la vie pour une gamine russe qui se jure qu’un jour, elle maîtrisera la langue française mieux que les condisciples potaches qui ne sont pas capable de l’accueillir. Assurément, elle a atteint ce niveau de maîtrise. Sa plume est délicieuse, colorée, fluide et addictive.

Ce livre est une mine de renseignements sur cette époque moscovite, une invitation à apprécier la vie et ses conditions en se rendant maîtres de ces dernières. Un hymne à l’amour d’une grand-mère et à son ouverture d’esprit. Un appel aussi à tenir son rôle parental et à se préoccuper de la fragilité d’une enfant tout en l’éduquant, avec rigueur, pour la rendre apte à affronter le quotidien et à devenir quelqu’un plutôt que de subir un déterminisme de mauvais aloi.

Tout dans ce récit est mélange de tendresse, de raillerie, d’auto-dérision, d’espoir, d’humour et de volonté de vivre. Un beau et fort sujet, un grand plaisir pour le lecteur.  

Ce qu’en dit l’éditeur:

 » Les très bons conteurs, il est rare qu’ils sachent aussi écrire. On les écoute, on adore ça, on voudrait en garder trace, mais la plupart du temps ça ne marche pas. La magie s’évapore. De tout ce qu’elle raconte, Olga fait une épopée. Le monde de la mode, des marques, du glamour, dans lequel elle a longtemps travaillé, c’est dans sa bouche une comédie humaine féroce et burlesque. On rit, mais ceux qui la connaissent bien savent que c’est après la fin du dîner, quand la première vague d’invités est partie et que la seconde s’incruste en passant du vin à la vodka, qu’en insistant un peu, à peine, on peut aiguiller Olga vers sa vraie légende dorée : son enfance moscovite. »

Emmanuel Carrère

Olga Schmitt est née à Moscou. Cette agent d’artiste a vécu mille vies, fréquenté la scène rock, les défilés de mode, les galeries d’art et la presse de luxe, sans jamais renier les précieux préceptes de son éducation soviétique.

Citations:

« Toutes les tentatives du maudit Occident de mettre la Russie à genoux se sont avérées vaines. La Russie est restée couchée  » (Plaisanterie moscovite de l’époque brejnévienne.) Texte mis en exergue de ce livre.

« La vie s’occupe de tout, le chaos s’organise », dit-on en russe.

« Le système soviétique a cela d’astucieux qu’il met ses sujets en position de culpabilité constante. La vie d’un citoyen est remplie d’infractions. La punition est toujours au coin de la rue. »

« Un peuple qui aime ses poètes a encore un avenir. Celui qui n’aime que ses comiques n’a plus rien qu’un passé. »

2 commentaires sur « Suprême Soviète »

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