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Ma cote:        9/10   

Mon avis:

Philippe CLAUDEL que je retrouve avec ‘L’archipel du Chien’ est un auteur à l’écriture fluide, propre à se laisser lire sans que le lecteur ne se rende immédiatement compte que, derrière l’histoire, le roman, se dessine une vision de l’Homme et du Monde entaché de ses faiblesses, de ses manquements vis-à-vis de l’autre, de sa suffisance à chercher, à courte vue, son profit à ras de terre. Cet auteur m’avait touché dans ‘Les âmes grises’, roman retraçant le long cheminement d’un homme, le narrateur, qui fouille le passé pour retrouver qui il a été, pouvoir le dire, pouvoir enfin se sentir libre de renouer avec son amour de toujours ou par ‘La petite fille de M. Linh’ où l’on découvre le Pays des rizières, des forêts, celui des bambous et de la source née entre deux pierres et dont l’eau s’élance suivant cinq directions, comme les doigts d’une main offerte. C’est le pays perdu de M. Linh! Et puis il y a celui où il est perdu, le nôtre… Chaque fois, une écriture fine, ciselée, agréable à lire.
Ici encore, avec sa fable ‘L’archipel du chien’, Philippe CLAUDEL touche juste ! Même si c’est juste là où cela fait mal à notre humanité… si on prend la peine de lire au-delà du roman, de toucher le fond de l’âme humaine empêtrée dans ses croyances superficielles, les compromissions dont l’Homme est capable à la recherche de son intérêt, d’une petite vie sans histoire, sans envergure, sans résonance !
L’archipel du Chien est un petit bout de Terre soumis aux caprices du Brau, un volcan qui sommeille et pèse comme une menace permanente sur la tranquillité de tout un chacun. Sa communauté est plus un assemblage de morts, de passifs, d’oreilles et de coeurs fermés à tout ce qui perturbe la routine que de vivants, de questionneurs du Monde avides d’en découvrir la vérité. Son maire, gros patron pêcheur, règne en responsable de communauté … tant que rien ne vient déranger le cours de l’existence sans histoire de cette dernière. Qu’advienne un imprévu sordide, le maire perdra pied, confiance en lui et se révélera piètre gestionnaire de la crise et de la population. Son curé, depuis longtemps ne pratique plus guère ni les rites, ni les valeurs fondatrices de sa religion ; le médecin est plus préoccupé de la fermeté de ses cigares que de la vérité et du bien-fondé de ses diagnostics ; la vieille institutrice, sarment sec d’une vigne qui ne donne plus de fruits est davantage rongée par la perte de son prestige de maîtresse que par le développement intellectuel de la communauté dont elle a eu la charge avant que n’apparaisse le nouvel instit, un étranger, un malvenu puisque non-natif de l’île. C’est pourtant le seul qui aura un sursaut d’humanité et qui cherchera, contre tous, la vérité. Mais il ne récoltera que le mensonge et le statut de victime !
Effroyable fresque du petit genre humain que ce roman dans lequel Philippe CLAUDEL touche aux problèmes de l’immigration clandestine, des forces occultes de la mafia des passeurs, ceux liés à la recherche de l’intérêt personnel ou pseudo-collectif au détriment de la vérité. Il souligne la bassesse humaine capable de forger les pires mensonges pour dénigrer l’adversaire… Sous ce regard, pas de fin heureuse, seulement le tourment des uns, la perte des autres.
Lire le Monde à travers la voix qui raconte l’histoire de cet archipel est pour le moins dérangeant et pourtant, n’est-il pas vrai qu’ainsi va la vie ?
Au lecteur de décider. Suivre ou se bouger pour que cela change !

Citations:

Ce qu’en dit l’éditeur:

« Le dimanche qui suivit, différents signes annoncèrent que quelque chose allait se produire.Ce fut déjà et cela dès l’aube une chaleur oppressante, sans brise aucune. L’air semblait s’être solidifié autour de l’île, dans une transparence compacte et gélatineuse qui déformait ça et là l’horizon quand il ne l’effaçait pas : l’île flottait au milieu de nulle part. Le Brau luisait de reflets de meringue. Les laves noires à nu en haut des vignes et des vergers frémissaient comme si soudain elles redevenaient liquides. Les maisons très vite se trouvèrent gorgées d’une haleine éreintante qui épuisa les corps comme les esprits.On ne pouvait y jouir d’aucune fraîcheur.Puis il y eut une odeur, presque imperceptible au début, à propos de laquelle on aurait pu se dire qu’on l’avait rêvée, ou qu’elle émanait des êtres, de leur peau, de leur bouche, de leurs vêtements ou de leurs intérieurs. Mais d’heure en heure l’odeur s’affirma. Elle s’installa d’une façon discrète, pour tout dire clandestine. »

A propos de l’auteur:  [source: Babelio]

Philippe Claudel est un écrivain et réalisateur.

Après l’obtention de son baccalauréat en 1981, il mène une vie dissolue pendant deux années, passant son temps à écrire des poèmes, des scénarios, à jouer dans de nombreux courts métrages. En 1983, il rencontre Dominique sa femme qui l’incite à reprendre ses études. Il passe une licence de lettres modernes, ainsi qu’une licence d’histoire de l’art et un DEUG d’histoire et géographie. Il quitte son emploi de surveillant dans un lycée après avoir réussi le concours de PEGC en 1985. Par la suite, il passe et obtient le CAPES de lettres modernes, puis l’agrégation de lettres modernes. En 2001, il soutient une thèse de doctorat en littérature française consacrée à André Hardellet (1911-1974) sous le titre « Géographies d’André Hardellet ».
Il enseigne en collège, en lycée, dans des hôpitaux auprès d’enfants malades, pendant douze ans à la maison d’arrêt de Nancy et pendant quatre années dans un établissement spécialisé pour enfants handicapés. Il publie son premier roman, « Meuse l’oubli », en 1999 aux éditions Balland.
En 2001, il est nommé maître de conférences en littérature et anthropologie culturelle à l’Université de Nancy II (Université de Lorraine) où il enseigne toujours à temps partiel, en particulier l’écriture scénaristique au sein de l’IECA (Institut Européen de Cinéma et d’Audiovisuel).
Depuis 1999, Philippe Claudel a publié près d’une trentaine de livres – romans, récits, nouvelles, poèmes. En 2003, il obtient le Goncourt de la Nouvelle pour le recueil « Les petites mécaniques » et le prix Renaudot pour « Les âmes grises », qui recevra aussi, entre autres prix, Le Grand prix des Lectrices de Elle et est adapté au cinéma en 2005. Depuis cette date, les principaux livres de Philippe Claudel seront traduits dans le monde entier. En 2007, son roman « Le Rapport de Brodeck » remportera le Goncourt des Lycéens.
En 2008 sort sur les écrans son premier film, « Il y a longtemps que je t’aime », avec Kristin Scott Thomas et Elsa Zylberstein, qui obtiendra un grand succès en France couronné par deux César, et une reconnaissance internationale ainsi que de très nombreuses récompenses dont deux nominations aux Golden Globes et le Bafta du meilleur film étranger.
Il intègre l’Académie Goncourt en janvier 2012 au couvert de Jorge Semprún. Marié et père d’une fille, il vit à Dombasle-sur-Meurthe.

Les références:

Philippe Claudel

ISBN : 2234085950
Éditeur : STOCK (14/03/2018)

Un commentaire sur « L’Archipel du chien de Philippe Claudel »

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